François Saoudan (Jeune afrique) sur RFI : «Benssouda doit songer à démissionner !»

Propos recueillis sur RFI par Boga Sivori

Le Directeur des Rédactions de Jeune afrique, François Soudan, était hier sur RFI. Dans l’interview qu’il accordée à la radio française pour présenter la Une de son journal consacrée au dernier rebondissement dans le dossier Gbagbo/Blé Goudé, M. Soudan a ouvertement demandé la démission de la procureure de la CPI Fatou Bensouda. En raison des combines dans plusieurs affaires dont celle de la Côte d’Ivoire. Lisez:

François Soudan, vous consacrez votre édition de demain à l’affaire Gbagbo/Blé Goudé à la CPI. Pourquoi des hommes acquittés se trouvent ainsi en détention?

François Soudan : Ça parait totalement incompréhensible. Dans le cas Gbagbo, on est effectivement bien loin d’en avoir fini parce que, outre l’appel sur la libération dont l’audience se tiendra le 1er février, on ne sait ce que sera la réponse. Mais plusieurs jours après, il y aura sûrement l’appel sur l’acquittement. Ça peut durer des mois, deux ans. Alors entre temps, libération évidemment on peut l’espérer, mais sur manœuvre du bureau de la procureure, cette libération peut être à nouveau suspendue, ça peut durer très longtemps. Le problème c’est l’extraordinaire lenteur procédurale. Cela a un coût exorbitant, mais comment justifier l’incarcération de personnes que l’on libère au terme d’une interminable détention de 7 ans, de 8 ans ? On est vraiment désolé pour des personnes dont on n’a pas prouvé la culpabilité.  Alors on se confie à Dieu et bonne chance !

Si je vous comprends bien, François soudan, il n’y a, selon vous, aucune base légale pour priver des innocents de liberté

François Soudan: Il y a une base procédurale. C’est ce qu’on appelle les circonstances exceptionnelles. Le bureau de la procureure plaide le fait qu’ils pourraient s’évader. Ils pourraient refuser de répondre à une convocation de la CPI. Ils pourraient aller en Côte d’Ivoire par exemple et ne pas revenir à La Haye pour l’appel. Je crois que Fatou Bensouda joue son avenir dans cette affaire, elle joue sa réputation. Surtout que d’aucuns lui prêtent l’ambition de jouer un rôle politique majeur chez elle en Gambie. C’est son dossier dont elle a hérité de son mentor Ocampo. Et ce serait pour elle le troisième échec. L’échec de trop après l’épisode de Jomo Kenyatta et le non-lieu de Jean-Pierre Bemba.

Vous faites allusion à son avenir politique. Mais au prononcé de son acquittement, mardi, le président de la première Chambre de la Cpi, le juge italien Cuno tarfuser, a très sévèrement jugé justement le travail du procureur dans ce procès. alors, finalement est-ce ces derniers rebondissements dont nous venons de parler et qui sont incompréhensibles ne sont pas le signe d’un désarroi au sein même de la Cpi ? est-ce que la procureure Fatou Bensouda ne devrait pas régler le problème en démissionnant tout simplement ?

François Soudan: Pour les deux précédents, Kenyatta et Bemba, elle a ciblé des individus et elle a tenté de prouver leur culpabilité par des faits. Ici elle a fait le contraire. Mais elle n’est pas allée jusqu’au bout. Résultat, il y a eu beaucoup d’incohérence, beaucoup d’imprécision, beaucoup d’amateurisme ; Beaucoup de témoins de l’accusation qui sont devenus par la suite des témoins de la défense. Je crois que si on veut sauver la CPI qui demeure quand même une instance à laquelle ont adhéré, je le rappelle, 33 pays africains, oui il faut que Madame Bensouda songe à démissionner avant même la fin de son mandat qui, je crois, est en 2021.

Dernière question. Si la CPI peut décider ainsi de maintenir en prison des hommes qu’elle a ellemême innocentés, Laurent Gbagbo et Charge Blé Goudé ne risquent-ils pas de mourir en prison ?

François Soudan: C’est un peu le risque. C’est un peu ce que l’on peut craindre surtout pour Laurent Gbagbo qui a quand même 73 ans. On sait que c’est un personnage extrêmement résilient. On sait que c’est quelqu’un qui n’a jamais fait que la politique. Donc il y a ce risque de détention indéfinie. Ce qui serait un scandale.

Source: la Voie originale n°382 – Lundi 21 janvier 2019

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